viernes, 13 de mayo de 2011

La Tête de Cristal de Pierre-Guilhem Lapèze........... (Les plaisirs de la vie sans La Dame Blanche)




Extrait : « Les plaisirs de la vie sans la Dame Blanche »
(En deux parties)
   
Avant de sortir de prison j’avais longuement réfléchi à ce que j’allais faire compte tenu de ce que je savais faire suffisamment bien pour qu’on me paye pour le faire et la liste était brève.
         J’étais capable d’exercer correctement la profession d’antiquaire, de faire des sacs et des jeans en cuir genre "Lévis", et j’avais de solides bases en démolition et récupération, acquises avec mon copain Eric. Il était récupérateur de matériaux anciens, c’est-à-dire des cheminées anciennes, des boiseries, des carreaux en terre cuite anciens, des portes en noyer, des vases en pierre, des poutres, enfin tout ce qu’il fallait pour construire et décorer des maisons neuves avec des matériaux anciens.
         Après un séjour en prison qui s’était passé aussi bien que faire se peut, Françoise, une amie d’enfance avec qui j’avais renoué grâce aux P. et T., était venue me chercher à sept heures du matin à Périgueux, ville perdue aux fins fonds de nos belles campagnes.
         Elle m’avait emmené direct prendre un vrai petit-déjeuner dans un bar ; la pauvre avait conduit toute la nuit pour être à l’heure, puis après avoir passé un moment à rigoler, elle se leva et demanda quelque chose à la tenancière et revint s'asseoir.
         La grosse dame légèrement couperosée  jette une clef sur la table, et dit «la treize pour ces Messieurs- Dames. »
         Elle prit la clef et me dit :
         « Tu viens? » 
         Nous montons l’escalier et ouvrons la porte, là devant nos yeux une piaule bien propre dans le style rustique : un immense lit avec un édredon dans les rouges. Elle m’embrasse et chuchote :
         « Je vais prendre une douche ».
         Moi je m’allonge sur le lit en rêvassant :
         « Toi, mon petit, tu es vraiment chounard, une belle blonde, une piaule tellement courge qu’elle en devient marante, alors qu’il y a deux heures j’étais dans une cellule qui puait le tabac froid, ça pourrait être pire. »
          Elle sort et me dit :
         « Va-y tu dois puer la taule, je t’attends, prends ton temps et jette tes fringues, j'irai t'en acheter d'autres. »
         Je me déshabille, reste un moment à regarder les robinets mitigeurs, comme fasciné par tout ce luxe enfin par rapport de là d'où je viens et je me jette sous la douche en mettant la pression au maximum. Je me frotte comme un fou avec ses produits qui sentent bon la bourgeoise BCBG. 
         Je me lave les cheveux avec son shampoing et après je me fous de son démêlant, je me rince de partout, je m’essuie avec des serviettes que je laisse par terre et j’enfile un peignoir. Elle est déjà dans le lit et me dit juste « viens ».
         Je me jette sur elle comme un chien, pas romantique pour deux sous mais j’ai l’impression que c’est ce qu’elle attend ; quand je m’enfonce en elle, c’est trempé, quelle douceur, je lui fais tout ce que peut faire un homme chaste depuis plus de deux ans à une femme douce et parfumée.
         Dire que je lui dois tout à cette petite, c’est elle qui m’a rhabillé de pied en cap à ma sortie, elle aussi qui a loué un joli petit mas à St-Rémy-de- Provence et m’a avancé l’argent pour acheter un semi-remorque de carrelage ancien à Lyon, à B…ou, un des plus gros démolisseurs de la région lyonnaise.
         Je l'avais envoyée avec tailleur Channel et foulard assorti pour qu'il pense à autre chose quand il lui ferait son prix pour les dix mille carreaux des greniers du couvent des  Petites Sœurs des Pauvres, tout poussiéreux, et pas enduits de cette gomme rouge si difficile à enlever, une vraie merde.
          Et à sept heures et quart, elle revint avec un carré en terre  cuite de 16 x 16 à la main, en me disant :
         «  Il y en a dix mille... d’après lui c’est du top et je l’ai tellement bien embrouillé qu’il les laisse à 1 F 90 la pièce,  prends-les je suis sûre que c’est bon... ce con m’a presque violée dans son bureau ».
         Je calcule, ça fait soixante douze francs le mètre carré alors que ça se vend entre deux cent trente francs et deux cent soixante dix francs le m² :
         « Je prends mais tu sais que je n’ai pas de quoi payer... ».
          Elle me répond :
         «  T’occupe pas, toi tu les vends et ça ira bien. Tu aides aussi pour le chargement et le déchargement ; en plus toi qui touches ta bille en chimie trouve donc un moyen pour enlever l’enduit rouge qu’il y a sur certains car il m’a dit que certains lots, voire la plupart, sont composés pour moitié de carreaux peints ».
         Avec un couteau j’en gratte une parcelle que je mets dans une enveloppe, j’écris sur une feuille blanche le problème devant lequel je me trouve, à savoir que je dois dissoudre intégralement cette matière qui recouvre des dizaines de milliers de carreaux en terre cuite et ce, rapidement et totalement, puis je l’envoie à la maison "Mouxe" (produits chimiques en tous genres) à Marseille en leur demandant de mettre un chimiste sur le coup car je peux, s’ils y parviennent, devenir un de leur gros clients, ce qui les intéresse toujours.

Suite
        
         Revenons à mon histoire de sortie de prison avec Françoise ; après avoir fait l’amour comme des bêtes, il n’y a pas d’autres mots, elle me dit viens, on va au bord de la mer à Arcachon, je lui dis qu’en cette saison il n’y a pas grand-chose d’ouvert. « On verra bien » me répond-elle et nous prenons la route.
         Elle me dit avoir envie de manger des fruits de mer, je mets ma main entre ses jambes, elles sont chaudes et douces comme un duvet en plumes d’oie, je lui dis : 
         « Moi c’est toi que j’ai envie de manger ».
         Sans dire un mot elle se gare et baisse le siège du conducteur. Qui a dit que baiser dans une voiture était inconfortable et désagréable, c’est pas une question de confort mais d’envie, que ceux qui ne me comprennent pas s’abonnent à « Paris Match ».
    Nous arrivons à Arcachon, le temps est maussade, il bruine ; elle se gare, nous descendons de voiture, elle me prend la main et nous allons nous promener sur la plage, j’enlève mes pompes, elle aussi et nous marchons tranquillement sur la grève où déferle de longues vagues. Dans le lointain la dune du Pilât s’élève dans le ciel comme un gigantesque phallus ; de rares bateaux de pêcheurs passent de temps en temps et traversent le bassin.
   Elle pose sa tête sur mon épaule tout en faisant des dessins dans le sable avec un bout de bois qu’elle a ramassé en marchant, en se blottissant contre moi elle me dit :
         « T’es pas mieux là qu’où tu étais ce matin ? Tu sais, c’est pour ça que j’ai fait toute cette route, pour que tu aies une belle sortie de prison et que nous passions un moment juste tous les deux. J’ai suffisamment vécu pour savoir que ces moments-là sont rares précieux et ne durent pas éternellement et avec toi, qu’est-ce que je me sens bien. J'ai envie de passer deux ou trois jours ici, j’ai plus d’un million et demi de découvert à ma banque c’est pas deux ou trois jours dans un bon hôtel qui vont changer ma situation malheureusement ».
         Nous nous mettons en route en sens inverse jusqu’à ce que nous trouvions un bar de pêcheurs ; en février il n’y a pas beaucoup d’estivants. Nous entrons et une forte odeur de cirés mouillés, de tabac et de sueur nous prend à la gorge, c’est curieux mais pas désagréable.
         Une serveuse s’approche :
         « Et pour ces Messieurs- Dames qu’est-ce que se sera ? »
          « Avez-vous des huîtres? » demande Françoise.
         L’autre dit :
         « Oui,  même des plateaux de  fruits de  mer avec en prime une bouteille de muscadet».
         On s’allume chacun une clope et pour attendre, on commence à attaquer la bouteille de muscadet et quand les deux plateaux arrivent, elle a vraiment du plomb dans l’aile. Du coup on en demande une autre.
         Je reste un moment à admirer les huîtres, les palourdes, les moules et le reste, je suis fasciné, elles sont posées sur de la glace pilée, bien rangées sur un lit de varech ; ça me fait carrément planer, on dirait une nature morte qui attend juste de régaler les papilles.
         Il y a du pain de seigle, du beurre, du citron et tout ce qu’il faut, je ne vais même pas comparer avec ce que je mangeais la veille encore, ce serait ridicule.
         J’en enfourne une avec du pain beurré, c’est une vraie merveille pour mon palais qui est mort à toute sensation depuis deux ans, et une autre... Je  m’approche d’elle et lui demande :
         « Tu veux une pelle à l'huître ? »
          Elle me fait oui des yeux et je lui roule une pelle à l'huître, c’est délicieux. Tout le monde nous regarde étonnés et on se marre comme jamais.
         « Ouais!  C’est sûr, j’adore les huîtres et tout ce qui vient de la mer ».
         En général et en particulier d’ailleurs.
         On se descend la deuxième bouteille de muscadet, on en demande une troisième, les huîtres c’est salé et ça donne soif ; tant que nous y sommes, un autre plateau s’il-vous-plaît.
         Françoise demande si malgré la saison, il n’y aurait pas un hôtel ouvert. La bonne femme réfléchit et lui répond :
         « A part l'hôtel Royal qui ne ferme jamais il n’y a rien mais je vous préviens, c’est pas donné... ».
         «  Comme quoi ? » demande Françoise.
         « Quelque chose comme cinq cents francs par jour ».
         En effet pour l’époque c’était plus que cher... Elle demande où est-ce ; en effet c’est pas bien loin, elle demande l’addition et deux cafés et lui donne sa carte visa.
         Je n'ose même pas imaginer ce qu’elle vient de larguer comme argent juste pour deux heures de rigolade, et aussi à la note de l’hôtel à venir ... C’est-à-dire que je n’ai pas l’habitude, d’ordinaire c’est moi qui paye, mais là c’est carrément impossible.
         Nous sortons complètement bourrés et montons en voiture. Je lui demande si elle préfère que je conduise, ce à quoi elle répond « Pourquoi pas ? ».
         Je démarre, roule quelques centaines de mètres, et tout doucement je me gare devant l’hôtel. Nous descendons et entrons dans ledit hôtel qui a l’air plus que luxueux. Françoise se dirige vers la réception :
          « Je suppose que vous avez des chambres, nous en voudrions une avec vue sur la mer, un grand lit et une salle de bain pour deux ou trois jours ».
         Pas gênée elle discute le prix et obtient vingt pour cent de rabais.
         Ça m’étonne, et elle me dit :
         « Il n’y a personne, je vais pas me gêner ».
         Un garçon lui demande les clefs de la voiture pour monter les bagages et un autre nous emmène voir la chambre. C’est carrément somptueux, du lit on voit toute la baie d’Arcachon et même la dune du Pilât.
         Je m’allonge sur le lit qui est super confortable par rapport au précédent, empoigne un oreiller et je m’endors d’un coup comme un bébé. Il me semble rêver que l’on me déshabille et doucement je me réveille : Françoise est en train de faire une grande ballade à cheval qui de la manière dont elle gémit,  n’est pas loin de toucher à son terme, je mets mes mains sur ses hanches et m’enfonce en elle le plus profondément que je  peux et elle part dans un orgasme sans fin.
         Je lui caresse les cheveux doucement, approche mes lèvres de son oreille et lui chuchote à l’oreille :
         « Petite coquine, je vous inculpe de viol sur majeur consentent  et ravi ».
         Je suis vraiment trop fatigué, pourquoi ? C’est vraiment sans intérêt, mais j’ai mal à toutes les articulations. Je vous retrouve demain c’est promis,  là je vais dormir.
         Elle me dit : 
         « Elle est vraiment bien cette chambre, si tu veux on reste deux jours au pieu et on se fait monter des huîtres quand on a faim».
          Je lui réponds :
         «  Excellent programme,  je suis d’accord à cent pour  cent ».
         Vu que mon propos n’est pas d’écrire un bouquin porno, il y en a qui font ça très bien, je dirai que nous avons passé deux jours à faire l’amour, avalé un nombre incalculable de mollusques et bu une montagne de bouteilles de muscadet. De temps en temps nous sortions nous balader sur la plage. J’avais pris un couteau et du citron et nous improvisions des dégustations de coquillages, ramassés et aussitôt avalés... Qui peut rêver plus frais ?
         Elle me prit la main, posa sa tête sur mon épaule et me dit timidement à l’oreille :
         « Je suis vraiment bien avec toi j’aimerais que ça dure toujours ».
         Ce à quoi je répondis :  
         « Apprécions ce qui est, on verra bien pour ce qui sera, moi aussi je suis bien avec toi ».
          Le lendemain nous faisons nos sacs, prenons un petit-déjeuner pantagruélique et nous mettons en route pour Grenoble, ville où vit ma famille et où elle possède une entreprise de transport et de déménagements dont elle est en train de déposer le bilan. Son mari Patrice, un bon copain de bringue, est à l’hôpital. Elle me fait promettre de passer le voir dès que nous serons rentrés... Je lui demande :
         « Tu crois qu’il peut se douter de quelque chose ? »
         Elle me répond :
         « Bien sûr que non, vu qu’avant de venir te chercher il n’y avait rien entre nous, à part quelques flirts de gamins, d’ailleurs je ne lui ai pas caché que je venais te chercher à ta sortie et il a trouvé ça très bien ».
         Sur la route du retour, nous nous arrêterons à St -Rémy-de-Provence :
         «  Je veux te montrer le mas que j’ai loué à l’année, c’est super il y a un grand platane juste devant la porte et une fontaine qui coule en permanence ».
         Je lui dis que je suis un peu gêné par rapport à Patrice et que ce n’est pas mon genre de taxer la femme de mes copains, même si ce n’est pas le terme approprié.
         « Ne t’inquiète pas, ça fait bien longtemps qu’entre nous ça ne va plus du tout et que nous ne restons ensemble que pour les gamins et pour nos familles respectives ».
          Elle se gare, me roule une grosse pelle et me demande de conduire. Fatiguée, elle passe derrière, s’allonge comme un chat et se met à dormir avec un sac comme oreiller.
         Je  prends le  volant  et  me mets  à  conduire doucement d’abord et ensuite  normalement, c’est comme le vélo ça s’oublie pas. Au premier poids lourd qui me croise j’ai un peu le trac et après ça va tout seul. En roulant je regarde un guide Michelin et je me demande si je vais passer par en haut, par en bas, ou par le milieu, puis je me souviens qu’elle m’a dit vouloir s’arrêter à St-Rémy-de-Provence donc je passe par le bas. C’est plus long, mais à partir de Toulouse il y a des autoroutes. Much faster. [1]
         Je ne lâche pas le volant jusqu’à Toulouse, ma petite blonde dort toujours sur le siège arrière, faut dire qu’avec ce qu’elle a fait depuis trois ou quatre jours il y a de quoi. Je me gare devant un routier avec en tête l’idée de boire un café bien costaud ; je me dis que si j’avais un ou deux cachetons d’amphétamine ou un sniff de coke ce serait plus efficace pour conduire puis comme un goéland l’idée s’envole.
         Je commande un double café avec une goutte de cognac, un carajillo quoi, j’aime bien appeler les choses par leur nom quand elles en ont un, même si ce n’est pas dans la langue que je pratique à nouveau depuis quelques années.
         Le bar émet une sorte de bourdonnement typique de la France et qu’à vrai dire je n’aime qu’à moitié ; je lui préfère, ô combien, le bruit des fondas espagnoles, tellement plus vivant. Ici les gens vont boire de l’alcool comme ils vont à la messe, en silence.
         Je me mets à penser à la multitude de choses qui m’ont amené jusqu’ici et soudain je vois Françoise  entrer dans le bar en me cherchant du regard. Je lui fais un signe et elle vient s'asseoir à ma table.
         « Où sommes-nous? J’ai l’impression d’avoir dormi un an, merci de m’avoir recouverte d’une couverture, il faisait froid dans la voiture ; tu es vraiment gentil. Qu’est-ce que je vais boire, moi ?
          Elle trempe ses lèvres dans ma tasse et demande la même chose.
         Nous sommes à Toulouse, la ville rose. Je suis passé par là because,  après Perpignan il y a l’autoroute et c’est vraiment mieux que de traverser le Massif Central et le plateau avec toutes les vaches, que je déteste.
         Elle me dit :
         « Tu as bien fait ; à l’aller, je suis passée par le centre c’est vraiment une horreur, c’est quoi ici ? »
       « Un bar routier, excuse- moi je connais pas bien le quartier et je n’ai pas vraiment envie de le connaître. Qu’est-ce qu’on était bien à Arcachon je m’en souviendrais toute ma vie, les huîtres étaient délicieuses et toi aussi ».



[1]  « Bien plus rapide ».

3 comentarios:

  1. It could have been me... When you got out that time... I suppose it wasn't the right moment!!!

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  2. One thing I really don't understand it seems to me that we are the 2 only one who visit your superb blog, must be something we don't know about ou l'apocalypse ?

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  3. You know Pierre people can look at the blog but if they are not in Blogger they can't comment! So I suppose that is why we are the only ones that leave comments!!!! Patience Big Brother!!!

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